HUN-2011-3-008
a)  Hongrie / b)  Cour constitutionnelle / c) / d)  20-12-2011 / e)  166/2011 / f) / g)  Magyar Közlöny (Journal officiel), 2011/155 / h)  CODICES (hongrois).
 
Mots-clés du thésaurus systématique:
 
 
Institutions - Organes juridictionnels - Organisation - Ministère public - Compétences.
Droits fondamentaux - Droits civils et politiques - Garanties de procédure, droits de la défense et procès équitable - Champ d'application - Procédure pénale.
Droits fondamentaux - Droits civils et politiques - Garanties de procédure, droits de la défense et procès équitable - Recours effectif.
Droits fondamentaux - Droits civils et politiques - Garanties de procédure, droits de la défense et procès équitable - Accès aux tribunaux.
Droits fondamentaux - Droits civils et politiques - Garanties de procédure, droits de la défense et procès équitable - Impartialité.
Droits fondamentaux - Droits civils et politiques - Droit à la vie privée - Protection des données à caractère personnel.
 
Mots-clés de l'index alphabétique:
 
Témoin, données, traitement / Juge, choix, droit / Action pénale, exercice.
 
Sommaire (points de droit):
 
Des modifications du Code de procédure pénale avaient introduit des règles qui suscitaient des inquiétudes quant à la question de savoir si elles respectaient la Constitution et les obligations prévues par des traités internationaux. Il s’agissait: d’une règle selon laquelle certaines affaires seraient jugées par le tribunal auprès duquel le procureur choisirait d’exercer des poursuites; du fait que la manière dont sont traitées les données relatives aux témoins limite la liberté d’information; et de l’instauration d’un délai de garde à vue de 120 heures, aboutissant à l’impossibilité pour l’intéressé d’avoir accès à un avocat pendant les 48 premières heures.
 
Résumé:
 
I. Une modification récente du Code de procédure pénale permettait au procureur général d’exercer des poursuites pénales devant une juridiction différente de celle qui aurait normalement été compétente, à condition que la nouvelle juridiction puisse juger l’affaire dans un délai raisonnable. Cette possibilité ne s’appliquait qu’à certaines infractions, telles celles relevant de la criminalité ou délinquance organisée ou économique.
 
Certains estimaient que la totalité du «paquet» modifiant le Code de procédure pénale (ou une partie de ses éléments) était inconstitutionnelle et pouvait enfreindre des traités internationaux tels que la Convention européenne des Droits de l’Homme. Plusieurs requérants, dont le président de la Cour suprême, ont contesté en conséquence devant la Cour constitutionnelle la réforme du Code de procédure pénale.
 
Parmi les modifications apportées au Code de procédure pénale, il y avait une règle qui aurait permis au procureur général de choisir lui-même telle ou telle juridiction pour connaître de certaines infractions, notamment en matière de criminalité ou délinquance organisée ou économique, en exerçant des poursuites devant une autre juridiction que celle désignée par la loi si cela était jugé nécessaire pour accélérer la procédure. La raison d’être de cette modification était de doter le ministère public d’outils plus forts et plus efficaces, afin de conclure dans les délais un plus grand nombre d’enquêtes et de procès en matière pénale, surtout dans les affaires pénales à caractère économique ou spécial, par exemple en cas de corruption ou d’abus d’un pouvoir officiel.
 
II. En tout état de cause, la Cour a jugé inconstitutionnelle la règle ci-dessus. Se fondant sur la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l’Homme, la Cour a estimé que cette règle enfreignait la Convention européenne des Droits de l’Homme en faisant obstacle au droit à un tribunal impartial et en portant atteinte au principe du procès équitable. L’exercice de poursuites devant une autre juridiction que celle désignée par la loi ne serait constitutionnel et conforme à la Convention que si la décision était prise au sein du pouvoir judiciaire indépendant et si les règles concernant l’exercice de l’action pénale devant un autre juge que le juge naturel étaient claires et prévisibles, avec des conditions normatives ne laissant aucune marge de manœuvre.
 
La Cour a déjà eu l’occasion de juger (décision n° 104/2010) qu’il n’existait aucun motif ou objectif constitutionnel sur le fondement duquel le juge d’instruction, le procureur ou le tribunal pourrait avoir le droit de refuser d’accéder à une demande de traitement confidentiel des données à caractère personnel relatives à un témoin. L’octroi à la justice d’une possibilité de pouvoir discrétionnaire dans le cadre de la procédure pénale constituait une restriction inutile du droit du témoin à l’auto-détermination en matière d’information. En l’espèce, la Cour a aussi jugé que le traitement des données relatives à un témoin d’une manière limitant le droit à l’autodétermination en matière d’information était contraire à la Constitution.
 
La Cour a jugé en outre que la règle du délai de garde à vue de 120 heures pour certaines infractions spéciales (en matière de criminalité ou délinquance organisée ou économique, par exemple) était inconstitutionnelle. En vertu de l’article 55.2 de la Constitution, toute personne soupçonnée d’avoir commis une infraction pénale et placée en garde à vue doit être soit remise en liberté soit traduite devant un juge dans les plus brefs délais. Une durée de 120 heures ne saurait être considérée comme «les plus brefs délais». La Cour a tenu compte de l’arrêt rendu par la Cour européenne des Droits de l’Homme dans l’affaire Brogan et autres c. le Royaume-Uni, où la Cour a conclu qu’une durée de garde à vue de 102 heures ne satisfaisait pas à la condition de célérité exigée par l’article 5.3 CEDH.
 
Enfin, la Cour a jugé que la disposition en vertu de laquelle l’intéressé n’aurait aucun accès à un avocat pendant les 48 premières heures de sa garde à vue était contraire à la Constitution car elle diminuait les droits de la défense et portait atteinte au droit à un recours effectif.
 
III. Les juges Balogh, Bragyova, Dienes-Oehm, Holló et Lenkovics ont joint des opinions concordantes; les juges Dienes-Oehm, Holló, Kiss, Lévay et Szívós ont joint à l’arrêt des opinions dissidentes.
 
Renseignements complémentaires:
 
Peu après que la Cour eut annulé la disposition relative au changement du lieu du procès, le parlement a inséré la règle en question dans l’amendement de la loi fondamentale; en conséquence, la Cour ne pourra plus se prononcer sur sa constitutionnalité.
 
Renvois:
 
Cour européenne des Droits de l’Homme:
 
-   Brogan et autres c. le Royaume-Uni, n°s 11209/84; 11234/84; 11266/84; 11386/85, 29.11.1988, (série A, n° 145-B; Bulletin spécial ? Grands arrêts CEDH [ECH-1988-S-007]).
 
Langues:
 
Hongrois.