HUN-1993-1-002
a)  Hongrie / b)  Cour constitutionnelle / c) / d)  12-02-1993 / e)  4/1993 / f)  Biens de l'Église / g)  Magyar Közlöny (Journal officiel), 15/1993 / h)  CODICES (hongrois).
 
Mots-clés du thésaurus systématique:
 
 
Sources - Catégories - Règles écrites - Règles nationales - Constitution.
Sources - Catégories - Règles écrites - Règles nationales - Lois et normes à valeur quasi-constitutionnelle.
Principes généraux - Relations entre l'État et les institutions religieuses et philosophiques.
Institutions - Organes législatifs - Procédure d'élaboration des lois - Quorum.
Institutions - Organes législatifs - Procédure d'élaboration des lois - Majorité requise.
Droits fondamentaux - Problématique générale - Limites et restrictions.
Droits fondamentaux - Égalité - Critères de différenciation - Religion.
Droits fondamentaux - Droits civils et politiques - Droit à la réparation des dommages causés par la puissance publique.
Droits fondamentaux - Droits civils et politiques - Liberté de conscience.
Droits fondamentaux - Droits civils et politiques - Liberté des cultes.
Droits fondamentaux - Droits civils et politiques - Droit de propriété.
 
Mots-clés de l'index alphabétique:
 
École, laïque / Education, religieux / Bâtiments scolaires, restitution.
 
Sommaire (points de droit):
 
L'État doit rester neutre en matière religieuse. Les écoles gérées par l'État ne doivent pas être acquises à une confession quelconque. Lorsque l'État restitue des bâtiments scolaires à l'église dans le cadre du processus de restitution, il doit permettre aux enfants de fréquenter des écoles non confessionnelles. Cette conclusion ne saurait signifier qu'un fardeau disproportionné est placé sur ceux qui veulent fréquenter ces écoles non confessionnelles.
 
Même si, dans certains cas, la Constitution exige un vote à la majorité des deux tiers pour promulguer une loi sur un droit fondamental, la même exigence ne s'applique pas à toutes les lois portant sur ce droit spécifique.
 
Résumé:
 
Les requérants ont contesté la constitutionnalité de la loi qui prévoit la restitution des biens immobiliers - y compris les bâtiments scolaires - aux églises qui en étaient les propriétaires avant la nationalisation communiste. Toutefois, la décision englobe tous les aspects fondamentaux de la liberté de religion. La Cour a souligné que la neutralité de l'État n'était pas de l'indifférence et elle a appliqué le principe de la neutralité aux écoles gérées par l'État. Cependant, la séparation de l'État et de l'église n'exclut pas des éléments de coopération. Il existe donc une justification constitutionnelle de la restitution de parties des anciens biens de l'église sur la base de la fonctionnalité.
 
La Cour a estimé que l'État doit rester neutre dans les affaires concernant le droit à la liberté de conscience et de religion. Cela englobe une obligation de l'État de garantir la possibilité de se former librement des convictions personnelles. L'article 60 de la Constitution garantit la liberté de conscience et de religion, y compris la liberté de choisir ou d'adopter une religion ou une conviction personnelle, la liberté de la pratiquer, y compris le droit (négatif) de ne pas manifester une conviction, et le droit d'association et de réunion religieuses. D'un côté, la religion fait partie du droit à la dignité humaine. La garantie de sa liberté assure la libre expression de la personnalité d'un être humain, laquelle ne saurait être limitée par la loi. L'État a donc le devoir de ne pas s'immiscer dans l'exercice de cette liberté. D'un autre côté, il existe également une relation étroite entre le droit au libre exercice de la religion et le droit à la liberté d'expression. Étant donné que la manifestation de cette liberté est l'exercice de la religion ou du culte, toute loi limitant cette liberté doit être interprétée strictement, de même que les lois concernant la liberté d'expression. L'État doit protéger la liberté de conscience et de religion sans tenir compte de sa valeur ou de son contenu (ainsi le droit peut seulement avoir des limitations extérieures) et c'est de ce raisonnement que l'État tire sa neutralité, comme souligné par l'article 60.3 de la Constitution.
 
L'État ne doit pas favoriser une église ni influer sur son fonctionnement interne, notamment en matière de vérités religieuses. Il est au contraire tenu de traiter toutes les églises de la même façon et de permettre à chacun d'exercer sa liberté de conscience. Toutefois, le fait que l'église soit séparée de l'État ne signifie pas que l'État devrait ignorer les caractéristiques de la religion et de l'église dans sa législation. C'est ainsi qu'il peut prendre en considération tout ce qui distingue les églises et les communautés religieuses en termes d'histoire et de rôle social des autres groupes sociaux dont l'instauration est régie par les articles 3, 63 et 70/C de la Constitution. Ces fonctions englobent l'enseignement scolaire, les soins aux malades et les oeuvres de bienfaisance, fonctions qui incombaient autrefois exclusivement à l'église mais qui ont été confiées également à l'État au moment de la nationalisation. De plus, le système juridique de l'État neutre assure que les communautés religieuses peuvent utiliser librement la forme juridique d'une «église» telle que définie par les lois laïques de l'État, à condition qu'elles remplissent les critères énoncés dans les lois applicables et qu'elles mènent leurs activités dans la sphère qu'elles ont choisies. La neutralité de l'État en liaison avec le droit à la liberté de religion ne signifie donc pas l'inactivité. En fait, l'État est tenu d'assurer les conditions propices à la formation et au développement d'idées différentes et de permettre la libre formation de convictions personnelles.
 
Une école (publique ou étatique) ne peut être acquise à une religion ou à une conception du monde, mais doit permettre l'expression impartiale, équilibrée et complète des idées dominantes dans la société, offrant la possibilité d'un choix libre et bien fondé. Lorsqu'une école est patronnée par l'État ou l'administration locale mais autorise un enseignement acquis à une religion, cette école doit être considérée comme une école «engagée» comme les autres écoles confessionnelles, autrement l'exigence de neutralité religieuse n'aurait aucun sens. Dans le cadre de l'exercice de la liberté de religion, les parents ont le droit d'envoyer leurs enfants dans des écoles confessionnelles et non dans des établissements qui sont opposés à leur conception du monde. Il n'est pas inconstitutionnel que ces personnes, qui agissent selon leur conscience, soient contraintes à faire un sacrifice, s'il est proportionné. En conséquence, si l'État doit assurer la possibilité juridique de créer des écoles qui ne sont pas neutres, il n'est pas obligé de les créer. Toutefois, lorsque l'église ou les parents créent ou gèrent des écoles «engagées», il incombe à l'État de les soutenir dans la mesure nécessaire pour satisfaire à ses obligations à leur égard.
 
L'État est également tenu de fournir une solution de rechange viable en permettant la fréquentation d'écoles publiques neutres à ceux qui refusent de fréquenter des écoles confessionnelles, sans entraîner de discrimination ou leur imposer un fardeau injustifié. En conséquence, alors que l'État et l'administration locale ne sont pas obligés de créer une école confessionnelle pour ceux qui la choisissent, ils sont tenus de mettre en place une école neutre lorsque la demande en est faite, même dans les cas où le nombre des élèves est faible.
 
Le requérant a fait valoir que la loi est contraire à l'article 70/A de la Constitution, car elle établit une distinction entre les églises ayant droit à la restitution de leurs biens et les autres églises ainsi que les organisations ayant subi des pertes immobilières analogues. La Cour a cependant décidé qu'il n'y a pas discrimination inconstitutionnelle entre les églises et les autres entités juridiques. La nature de la restitution des bâtiments diffère fondamentalement du concept de l'indemnité partielle pour préjudice injuste occasionné à des citoyens. Cela découle de la différence entre la fonction des biens des personnes et des entités juridiques exerçant une activité commerciale ou représentant certains intérêts et les fonctions des biens de l'église. En vérité, le rôle social historique des églises et le fait que leur fonctionnement est inséparable du droit à la liberté de religion constituent une base satisfaisante pour que les églises soient classées parmi les organisations aux besoins desquelles l'État subvient et pour que l'État leur transfère des biens. Il est également logique que les églises qui n'étaient pas en fonction à l'époque considérée ou qui n'ont pas subi de pertes n'aient pas droit à la restitution puisque le présent transfert porte sur des bâtiments autrefois utilisés par les églises habilitées pour mettre en oeuvre leur droit à l'exercice de la liberté de religion, lesquelles peuvent maintenant les réclamer dans le même but conformément à leurs besoins réels.
 
Enfin, l'affaire a permis à la Cour de statuer sur la question, dont il est souvent fait un usage politique abusif, de la majorité qualifiée exigée pour promulguer des lois sur certains sujets énumérés dans la Constitution, tels que la liberté de religion, les droits des minorités ethniques et nationales et la citoyenneté. La nécessité d'un large consensus pour modifier ces droits dans la Constitution reflète leur importance politique. Le droit fondamental n'est pas un sujet législatif à tous les égards. Une loi, même s'il s'agit d'une loi à majorité qualifiée, n'est nécessaire que pour définir le contenu du droit fondamental, ses garanties substantielles et sa limitation directe et caractéristique. La protection et la jouissance des droits fondamentaux seraient indûment limitées si chaque changement et développement ou garantie partielle ne déterminant pas le concept réglementaire nécessitaient la majorité des deux tiers. La réglementation légale concernant un droit fondamental avec ses règles particulières et détaillées ou appliquant directement une disposition constitutionnelle précise exige seulement la majorité simple. Étant donné que la loi contestée par les requérants porte sur la réglementation détaillée de diverses questions et non pas sur l'orientation et la défense du droit à la liberté de conscience et de religion, son adoption à la majorité simple au Parlement est conforme à l'article 60.4 de la Constitution.
 
Langues:
 
Hongrois.